Cher ami, de ma vie je vous écris dans votre vie – Yiyun Li
(Dear Friend, from My Life I Write to You in Your Life, 2017)
Belfond, 2018, 224 pages
Traduction de Clément Baude
(Dear Friend, from My Life I Write to You in Your Life, 2017)
Belfond, 2018, 224 pages
Traduction de Clément Baude
Après deux romans et un recueil de nouvelles, Yiyun Li revient avec une série d’essais dans lesquels elle entremêle ses expériences personnelles d’enfant en Chine, d’adulte se construisant une nouvelle vie aux Etats-Unis, émigrée, scientifique, écrivain. Ces textes ont pour thème la reconstruction psychique et artistique et convoquent les écrivains que l’autrice admire. Et Yiyun Li de se demander : pourquoi écrire ? Pourquoi vivre ?
Dans ces textes souvent poignants, Yiyun Li dévoile son intériorité et cela a plusieurs conséquences. Tout d’abord, ce cheminement très personnel est parfois difficile à suivre, que ce soit parce qu’il est unique et qu’il ne peut donc rencontrer un écho chez le lecteur ou parce que l’écriture un brin impersonnelle nous garde à distance, sans compter les développements souvent abstraits. Cela dit, rester fidèle à sa singularité c’est aussi nous offrir une réflexion unique et mettre en œuvre ce principe de l’autrice : être là où on ne l’attend pas. Dans une société toujours plus uniformisée et conformiste, c’est vivifiant. Yiyun Li évoque son cheminement, la façon dont elle a surmonté des douleurs immenses qui la conduisirent au bord du suicide ; c’est comme voir un papillon émerger de sa chrysalide. Nous sommes tous à nuls autres pareils, différents de nos parents, libres de refuser les étiquettes, de ne pas entrer dans les cases. Et peu importe si la singularité se paie cher : c’est la seule façon de se réconcilier avec soi, de trouver sa route.
« La possibilité que l’on se souvienne de moi… m’inquiète – non par volonté d’effacement, mais par crainte que les souvenirs des autres n’effacent quelque chose d’essentiel. »
Ce qui pourrait passer pour un monologue auto-centré est en vérité une construction collective. Yiyun Li converse avec des écrivains dont elle se sent proche d’une façon ou d’une autre, en particulier William Trevor qu’elle donne envie de (re)lire, Katherine Mansfield, John McGahern et bien d’autres. Elle nous livre son goût pour les correspondances. On comprend combien les écrivains, en tant qu’êtres humains, et la littérature l’ont aidée à trouver un sens à sa vie.
Ce livre bref mais dense nécessite une bonne disponibilité d’esprit. C’est une lecture éreintante mais gratifiante.
Ce livre m'a été transmis par l'éditeur.