Un millier d’années de bonnes prières – Yiyun Li
(A
Thousand Years of Good Prayers, 2005)
10-18, 2015, 257
pages
Traduction de
Françoise Rose
En même
temps qu’est paru le dernier roman de l’auteur, Plus doux que la solitude, ce
recueil de nouvelles est sorti en poche.
On y
retrouve l’écriture ciselée de Yiyun
Li, sa douceur feinte qui souligne la férocité du propos, son regard à la fois
tendre et sans concession sur des personnages toujours un peu sur le fil.
> Les
histoires sont d’une grande variété, d’où un
recueil riche qui semble plus fourni qu’il ne l’est (dix textes quand même).
La
focalisation est également différente d’un texte à l’autre ; le narrateur
est parfois un simple observateur, le personnage central ou encore omniscient.
Les intrigues
sont particulièrement travaillées pour des nouvelles. Au-delà du problème
principal, d’autres points, tout aussi essentiels et intéressants, sont
abordés. Par exemple, dans la dernière nouvelle qui donne son titre au recueil,
la tension majeure réside entre un père chinois et sa fille émigrée aux
Etats-Unis mais le récit met également en valeur les discussions entre le père en
visite et une émigrée iranienne de sa génération de façon sensible, touchante,
et finit par revenir au passé du père et à la « politique » chinoise,
le tout avec fluidité et cohérence.
Les
personnages sont réussis, y compris les figures secondaires.
> La
Chine, ses traditions, le communisme et la vie actuelle constituent toujours la
toile de fond des intrigues, de façon plus ou moins marquée. La critique se
fait par le côté, l’air de ne pas y toucher et pourtant sans ambiguïté. Le
lecteur attentif n’aura aucun mal à déchiffrer les messages véhiculés par ces
textes, même si on peut imaginer qu’une seconde lecture révèlera des sens non
perçus au premier abord.
Néanmoins,
l’amour que Yiyun Li porte à son pays est tout aussi prégnant. Elle montre qu’on
ne critique bien que ce que l’on aime (et que l’on connaît).
C’est
un recueil à découvrir et, d’une façon générale, une plume qui mérite d’être
plus connue. C’est subtil, fin, nuancé ;
on ne voit pas les coutures tant Yiyun Li maîtrise son art. Ce qui paraît
simple est en vérité le résultat d’une haute capacité à transmettre des
pensées, des gestes, des idées. Quand on pense que l’auteur n’écrit pas dans sa
langue maternelle, on est encore plus ébloui.
Ce livre m’a été transmis par
l’éditeur.