Le mouchard - Liam O’Flaherty
(The Informer, 1925)
Belfond, collection Vintage, 2019, 288 pages
Traduction de Louis Postif
Dublin, années 20. Mis au
ban de la société pour avoir commis une faute grave au sein de l’Organisation
révolutionnaire, Gypo Nolan va commettre l’irréparable : donner à la
police britannique son ancien complice et meilleur ami contre quelques billets.
Nous allons suivre l’errance
et les états d’âme de Gypo pendant vingt-quatre heures, tandis que l’Organisation
cherche à savoir qui est le traître afin de le juger et de s’en débarrasser.
C’est avant tout un texte
centré sur la psychologie et les tourments intérieurs d’un homme qui a perdu la
tête pour de l’argent. Mais Gypo n’est pas un cerveau ; c’est même
carrément un imbécile et il va se comporter comme tel, attirant irrémédiablement
l’attention sur lui.
Le préfacier indique qu’en
dépit de son statut de délateur, Gypo a un côté sympathique ; honnêtement,
j’ai trouvé le gars infect et stupide d’un bout à l’autre. A mon sens, l’art d’O’Flaherty
n’est pas là mais bien plutôt dans ses peintures de personnages. Tant sur un
plan physique, moral que psychologique, qu’il s’agisse de personnages
principaux ou secondaires, l’auteur nous régale de descriptions vivantes et
visuelles qui nous plongent dans le petit monde du peuple irlandais ; on
se croirait parfois au théâtre. On retrouve dans ce texte l’élan et les
tourments de L’âme noire dont le
souvenir m’habite encore.
L’intrigue est adroitement
menée ; sans que le suspense soit insoutenable, O’Flaherty sait agripper
le lecteur de la première à la dernière page.
Disons enfin que si le texte
est très enraciné culturellement, il l’est moins historiquement, ce qui rend l’intériorité
de Gypo intemporelle, détachée de tout contexte en définitive, Gypo comme un type
de traître, celui qui calcule mal et qui se retrouve pris au piège à tous
égards.
Une belle idée de réédition
pour un écrivain peu connu en France ; un roman noir qui se lit d’une
traite et plaira aux amateurs du genre.
Prix James Tait Black
Memorial
Ce livre m’a été transmis par l’éditeur.