Mélanie Claux est une fan de la
première heure des émissions de télé-réalité : elle n’a raté aucun épisode
du Loft, elle a postulé à divers avatars et a même fait une brève apparition dans
l’un d’eux. Quelques années plus tard, il semblait inévitable qu’elle soit
séduite par la possibilité de mettre en scène sa vie et celle de ses enfants,
Sam(my) et Kim(my), sur Youtube. Un jour, Kimmy disparaît alors qu’elle jouait à
l’extérieur avec son frère.
La police, dont Clara Roussel –
procédurière, entre en scène. Clara est l’antagoniste de Mélanie, sans que leurs
différences ne soient caricaturales pour autant. Clara aime le concret pas les
paillettes, la vie réelle pas les montages de réseaux sociaux. Elle va se
plonger dans cet univers, le décortiquer, tenter de comprendre les forces en
présence.
Delphine de Vigan s’est lancée dans
une entreprise d’équilibriste : ne pas céder à la facilité tout en mettant
en avant des convictions, analyser rapidement un phénomène sans prétendre à l’essai
sociologique, créer une intrigue qui serve l’ensemble mais qui soit également
intéressante en elle-même, tendre un miroir à notre époque sans écrire un
pensum de 500 pages (ni donner de leçons à qui que ce soit). Elle nous invite à
réfléchir au monde dans lequel nous voulons vivre, tout en pointant la
responsabilité commune ; autrement dit, elle fait son job d’écrivaine.
L’intrigue est bien construite,
même si je ne doute pas qu’elle en décevra certains. En effet, si la
disparition de la fillette est l’élément déclencheur, ce n’est pas pour autant
l’élément central de l’histoire. On pourra trouver également que Delphine de
Vigan a choisi une cible facile ; néanmoins, sans révolutionner nos
perceptions, elle utilise un ensemble d’éléments de façon convaincante et
fluide.
Comme dans tous ses romans, nous
retrouvons ici un sujet fort (même si je dois avouer qu’il ne m’intéresse pas au
quotidien, menant une vie à la Clara Roussel et ne comprenant pas ce
besoin de s’exhiber ou, à l’inverse, le voyeurisme), des opinions bien
affichées et des mots justes qui disent l’essentiel. Pourtant, comme chaque
fois, le style de l’autrice me semble trop lisse, trop poli. Autant j’apprécie
qu’elle ne force pas le trait, autant un peu plus de caractère ajouterait du
relief à ses livres.
Ce roman ne fait que confirmer l’intérêt
que je porte à l’œuvre de cette autrice qui me touche plus que je ne le
voudrais.
Un entretien sur le site de l’éditeur qui montre combien elle sait rester dans la mesure.