Les enfants sont rois – Delphine de Vigan

 

Les enfants sont rois – Delphine de Vigan
Les enfants sont rois – Delphine de Vigan
Gallimard, 352 pages, 2021

 

Mélanie Claux est une fan de la première heure des émissions de télé-réalité : elle n’a raté aucun épisode du Loft, elle a postulé à divers avatars et a même fait une brève apparition dans l’un d’eux. Quelques années plus tard, il semblait inévitable qu’elle soit séduite par la possibilité de mettre en scène sa vie et celle de ses enfants, Sam(my) et Kim(my), sur Youtube. Un jour, Kimmy disparaît alors qu’elle jouait à l’extérieur avec son frère.

La police, dont Clara Roussel – procédurière, entre en scène. Clara est l’antagoniste de Mélanie, sans que leurs différences ne soient caricaturales pour autant. Clara aime le concret pas les paillettes, la vie réelle pas les montages de réseaux sociaux. Elle va se plonger dans cet univers, le décortiquer, tenter de comprendre les forces en présence.

Delphine de Vigan s’est lancée dans une entreprise d’équilibriste : ne pas céder à la facilité tout en mettant en avant des convictions, analyser rapidement un phénomène sans prétendre à l’essai sociologique, créer une intrigue qui serve l’ensemble mais qui soit également intéressante en elle-même, tendre un miroir à notre époque sans écrire un pensum de 500 pages (ni donner de leçons à qui que ce soit). Elle nous invite à réfléchir au monde dans lequel nous voulons vivre, tout en pointant la responsabilité commune ; autrement dit, elle fait son job d’écrivaine.

L’intrigue est bien construite, même si je ne doute pas qu’elle en décevra certains. En effet, si la disparition de la fillette est l’élément déclencheur, ce n’est pas pour autant l’élément central de l’histoire. On pourra trouver également que Delphine de Vigan a choisi une cible facile ; néanmoins, sans révolutionner nos perceptions, elle utilise un ensemble d’éléments de façon convaincante et fluide.

Comme dans tous ses romans, nous retrouvons ici un sujet fort (même si je dois avouer qu’il ne m’intéresse pas au quotidien, menant une vie à la Clara Roussel et ne comprenant pas ce besoin de s’exhiber ou, à l’inverse, le voyeurisme), des opinions bien affichées et des mots justes qui disent l’essentiel. Pourtant, comme chaque fois, le style de l’autrice me semble trop lisse, trop poli. Autant j’apprécie qu’elle ne force pas le trait, autant un peu plus de caractère ajouterait du relief à ses livres.

Ce roman ne fait que confirmer l’intérêt que je porte à l’œuvre de cette autrice qui me touche plus que je ne le voudrais.

Un entretien sur le site de l’éditeur qui montre combien elle sait rester dans la mesure.