La vie matérielle - Marguerite Duras


La vie matérielle  - Marguerite Duras
La vie matérielle  - Marguerite Duras
 Folio, 1994, 180 pages


Livre fourre-tout, pêle-mêle de souvenirs et de réflexions, La vie matérielle est inclassable et souvent touchant.
Duras y évoque quantité de choses : l’amour, son alcoolisme, la marche du monde, le rôle de la femme (on y reviendra), l’écriture, etc.

Si par certains aspects le livre a (très) mal vieilli, c’est une lecture agréable et émouvante. Duras y apparaît à la fois en écrivain n’ayant plus rien à prouver, en femme vieillissante ayant tiré quelques leçons de l’expérience de la vie. Et puis il y a son style, à la fois oral (qui plus est dans ce livre dont la forme est particulière) et soigné, soutenu, cette voix qui me charme quasiment à tous les coups. Certains textes ont une beauté presque insoutenable. La façon dont Duras évoque son alcoolisme rend sa décrépitude quasi comique, bien involontairement. On sent en elle une pudeur, une incapacité à se laisser aller tout à fait sur le sujet, très éloignée des jeunes femmes modernes que sont Amy Liptrot et Leslie Jamison par exemple ; sans être impudiques, ces dernières ont un franc parler qui leur permet d’aller au fond des choses quand Duras paraît tellement effrayée par ce qui lui arrivait qu’elle répugne à analyser des souvenirs qu’elle reconnaît à peine.

A contrario, l’autrice peut être insupportable dans sa façon de présenter la femme, son rôle au sein du foyer ; c’est tellement ringard qu’on ose à peine croire ce qu’on lit. Certains propos sur les homosexuels sont quant à eux invraisemblables. Je ne sais pas si tout cela témoigne d’une époque ou si Duras était incapable de s’adapter à l’évolution de la société.

Globalement, cela reste une lecture plaisante ; il faut s’intéresser un minimum à Duras pour l’apprécier mais, le cas échéant, il vaut le détour.