La liste de Freud – Goce Smilevski
(Sigmund
Freud’s Sister, 2009)
10/18, 2015,
255 pages
Traduction
d’Arthur et Harita Wybrands
Dans le cadre d’un défi personnel sur les
écrivains européens, je suis tombée sur Goce Smilevski, un auteur macédonien.
Bien que peu friande de Freud, je me devais de lire cet ouvrage dont le titre
anglais est bien plus juste que le français.
1938. L’Allemagne nazie s’apprête à envahir
l’Autriche ; les Juifs cherchent à fuir. Alors qu’on lui délivre des visas
pour l’Angleterre, Freud est autorisé à soumettre une liste de vingt personnes
qu’il souhaite emmener avec lui. Certains choix sont improbables mais ce qui
choque c’est l’absence de places pour ses sœurs qui mourront toutes les quatre dans
les camps.
Cependant, le livre n’est pas vraiment centré sur
ce sujet ; on n’a même pas d’explication véritable sur ce choix si ce
n’est un mélange d’égoïsme et d’indifférence.
En revanche, c’est bien une des sœurs de Freud qui
tient le lecteur avec sa narration prenante, quasi-hypnotique. Adolphine n’est
pas particulièrement intéressante mais elle sait peindre le portrait d’une
époque qui se meurt, nous fait côtoyer quelques célébrités mais surtout les
fantômes qui vivent dans leur ombre comme Clara Klimt, la sœur de Gustav.
Les femmes ont une place prépondérante dans ce
livre lumineux. Leur condition dans la société est encore très précaire et
celles qui veulent faire sauter les verrous sont enfermées.
La voix d’Adolphine est envoûtante ; elle
mêle faits historiques, introspection, rapporte des échanges entendus, témoigne
d’une vie intérieure troublée et indécise mais aussi du bouillonnement d’une
époque. Ce récit est tel une tragédie grecque : fascinant vu de
l’extérieur mais terrible pour ses protagonistes.
Un très bon livre à découvrir si ce n’est déjà
fait.