L’envers de l’espoir – Mechtild Borrmann
(Die
Andere Hälfte der Hoffnung, 2014)
JC Lattès, 2016, 288 pages
Traduction de Sylvie
Roussel
Valentina vit dans la zone interdite de Tchernobyl. Cette
femme usée par la vie attend désespérément le retour de sa fille Katerina dont
elle n’a plus de nouvelles depuis des mois. Katerina semble avoir disparu,
comme beaucoup d’autres étudiantes parties pour l’Allemagne avec une bourse en
2009. Pour combler le vide et garder l’espoir de la retrouver, Valentina
consigne dans un cahier, à la lumière de la bougie et dans le froid glacé de
l’hiver, l’histoire de sa vie, avant et après la catastrophe.
Dans le même temps, en Allemagne, Matthias Lessmann cache
une jeune fille qu’il a recueillie un matin d’hiver alors qu’elle tentait
d’échapper à de mystérieux hommes en 4 X 4 noir.
Voilà un roman palpitant, bien
conçu et efficace. Bien que l’intrigue puisse paraître un peu complexe du fait
des multiples fils narratifs, c’est suffisamment clair pour que le lecteur ne
se perde pas entre les personnages, les pays, les époques.
En suivant l’histoire de
Valentina, on revient sur la catastrophe de Tchernobyl, vue ici de très près, à
travers le regard de personnes directement touchées. Certains passages rappellent
Tout ce qui est solide se dissout dansl’air de Darragh McKeon.
La peinture de l’Ukraine post-révolution orange est, quant à elle, passionnante : rien que pour
cet aspect, le livre vaut la peine d’être lu. En outre, le fonctionnement des
réseaux de trafiquants d’êtres humains est exposé sans fioritures, ce qui
ajoute à la crédibilité de l’histoire.
Mais ce qui marque, c’est la
façon dont Mechtild Borrmann mène l’intrigue : le déploiement est très
progressif sans que l’on ait pour autant le sentiment qu’il ne se passe rien.
Les éléments nous sont révélés au compte-goutte mais ce sont surtout leurs liens
cachés et leurs imbrications qui intriguent. La lecture est intense, avec une
tension calculée au millimètre et bon nombre de palpitations.
C’est un roman d’une noirceur impitoyable. Si un livre
porte bien son nom, c’est celui-là. Il offre une plongée dans une histoire
nationale douloureuse et une attention portée aux oubliés, ces hommes et ces
femmes trompés par l’ex-URSS, aux vies brisées, abandonnés comme des malpropres.
Je ne connaissais Mechtild
Borrmann que de réputation ; cette première rencontre ne sera pas la
dernière.
Ce livre m’a été transmis par l’éditeur via NetGalley.