Liquidations à la grecque – Petros Markaris
(Lixiprothesma
dania, 2010)
Points, 2013, 353 pages
Traduction de Michel
Volkovitch
Mort aux banquiers ! À
Athènes, on retrouve plusieurs personnalités du monde de la finance décapitées,
tandis que des tracts inondent la ville, appelant les clients des banques à ne
plus rembourser leurs emprunts. Le commissaire Charitos mène l’enquête sur fond
de crise économique.
Premier volume de la trilogie
de la crise, ce roman a gagné le prix du polar européen du Points.
Malheureusement, ses atouts m’ont semblé limités.
Tout d’abord, l’utilisation agressive
du présent de l’indicatif provoque, a
minima, une gêne à la lecture. Le début du roman est à la limite du lisible
et on est souvent au-delà du simple désagrément. Quel est l’effet recherché par l’auteur ?
Est-ce un problème de traduction ? Le résultat est hideux.
Ensuite, la construction est très artificielle : on
voit les coutures, c’est bancal. Par exemple, un indice intriguant est placé
dès le premier meurtre. Charistos en prend note en passant mais ne semble même
pas essayer de comprendre sa signification et, s’il le fait, le lecteur n’est
pas invité à suivre ses réflexions comme c’est le cas habituellement dans les
romans policiers. L’indice réapparaît à chaque crime mais on en reste là. Et
puis, alors que Charistos et que le coupable se font face, la réponse nous est
donnée ; cette absence de progression enlève tout plaisir à la révélation.
Ne parlons pas de coïncidences que le lecteur remarque dès le premier meurtre
mais qui vont nécessiter trois assassinats de plus pour que Charistos comprenne.
Au final, l’évolution de l’intrigue n’est guère crédible.
Plusieurs personnages manquent eux aussi de vraisemblance
tant ils sont caricaturaux. Ainsi ce policier de l’anti-terrorisme qui ne semble
être là que pour mettre en valeur le héros qui, lui, ne se laisse pas aveugler
par des théories fumeuses.
Pourtant, deux points m’ont paru relever tout ça. Charistos
est, tout comme le Brunetti de Donna Leon, un homme marié, père, un monsieur
tout le monde. On évite l’écueil de l’enquêteur marginal, torturé et c’est
appréciable.
Surtout, le contexte de la Grèce contemporaine frappée par
la crise est original et intéressant. Bien exploité, il plonge le lecteur dans
le quotidien de ces gens qui subissent le mépris de l’Europe, des instances
financières, de tous finalement tant on nous a dépeint la Grèce comme un pays
irresponsable, incapable de se tenir, indigne de l’Union Européenne.
Comment s’installer quand on est un jeune couple ?
Comment faire face quand on est un petit commerçant ? Boucler son budget avec
toujours moins, etc. Plus que l’intrigue, ce sont ces questions qui touchent le
lecteur et ajoutent véritablement de la valeur à ce polar.