Maxi-Livres, 2001, 96 pages
(existe dans quantité d'autres éditions)
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Récit fictif (mais qu’il semble
authentique !) d’un condamné à mort dont nous ne connaissons pas le crime,
ce texte rappelle combien cette peine n’est rien de moins que barbare.
Le narrateur se souvient de sa vie passée, celle
d’un homme normal et sans histoire, marié et père d’une petite fille.
Avec ce témoignage d’un homme parmi d’autres, Hugo
en appelle à notre empathie. Et
c’est sans peine que le lecteur se met dans la peau de cet homme tant la plume
de Victor Hugo nous le rend proche : nous vivons son angoisse et la
faisons nôtre ; nous partageons sa révolte. Or si Hugo aurait pu écrire un
plaidoyer contre la peine de mort en général, détaché de toute référence même
fictive, parions qu’il aurait eu un impact moindre que ce monologue intérieur qui
touche aussi bien la raison que le cœur du lecteur.
Dire que c’est admirablement bien écrit peut
paraître inutile mais ici l’écriture
donne un supplément de force au fond. Avec moins de maîtrise, le texte aurait
été un peu sec et moins prenant.
Il est découpé en courts chapitres, ce qui en
facilite d’autant plus sa lecture. Il n’est pas fait que de désolation mais
aussi de colère et même d’ironie. En lisant les graffitis sur le mur de sa
cellule, le narrateur découvre « Amour
pour la vie » et de penser : « Le malheureux ne prenait pas un long engagement. »
La description de l’hypocrisie ou de l’aveuglement
des personnes qui seront en contact avec le condamné (huissier, aumônier,
directeur de la prison, etc.) est fort réussie. Ces gens engourdis par le
train-train ne remarquent même plus l’horreur à laquelle est confronté le narrateur.
« … on
ne souffre pas, en sont-ils si sûrs ? Qui le leur a dit ? Conte-t-on
que jamais une tête coupée se soit dressée sanglante au bord du panier, et qu’elle
ait crié au peuple : Cela ne fait pas de mal ! »
En moins de cent pages tout est dit ; ni le
temps ni l’espace ne peuvent avoir de prise sur ce chef d’œuvre qu’il faudrait
lire et relire pour que jamais l’horreur de la peine de mort ne s’atténue. N’oublions
pas qu’elle est toujours de mise dans de nombreux pays, dont l’Indonésie qui
fait honteusement l’actualité. La peine de mort c’est l’obscurantisme, le
meurtre institutionnalisé qui ne résout rien ; Hugo le démontre avec
finesse.