The Bone People –
Keri Hulme
Picador, 1986
(paperback), 546 pages
(VF : The Bone People
ou les hommes du long nuage blanc)
A son retour
dans son ermitage, Kerewin Holmes découvre, tapi au fond de son atelier, un
enfant blessé et silencieux. Le lendemain, elle fera la connaissance de Joe,
Maori et père adoptif du jeune garçon. Entre ces trois tempéraments fougueux
que rien ne prédisposait à s'unir, s'instaure une extraordinaire relation
triangulaire.
The Bone People est un livre volcanique, une
fable polynésienne, une charade tout à la fois ethnologique et panthéiste.
Bien que ce
livre ait obtenu le Booker, il est méconnu pour ne pas dire totalement inconnu
de la très grande majorité des lecteurs. Je l'ai moi-même découvert par hasard
et je ne le regrette pas du tout.
C'est un
livre très dérangeant et qui a soulevé pas mal de controverses y compris du
fait que l'héroïne porte un prénom et un nom très proches de ceux de l'auteur,
ce qui laisserait supposer que Hulme souscrit au comportement de son héroïne,
comportement qui s'avère critiquable. Je ne sais rien de l'auteur et éviterait
donc de me prononcer sur cette théorie et de la juger inconsidérément.
Il n'en
reste pas moins que ce roman a exercé sur moi un double sentiment de fascination / répulsion et qu'il est de
fait difficile de s'en détacher. En effet, on ne peut rester indifférent à ce
livre tant il pose des questions, tant il nous interpelle et nous tend des
perches pour que l'on prenne parti. J'ai essayé de rester aussi neutre que
possible, de considérer les raisons de chacun mais j'avoue que j'ai aussi eu
beaucoup de mal à comprendre Kerewin, son absence de réaction, sa nonchalance
alors même qu'elle peut aider un enfant maltraité.
Evidemment,
les choses ne sont pas si simples et c'est en ce sens que ce livre est
problématique (et donc intéressant).
Au-delà du
fond, l'écriture est très particulière et l'univers dans lequel évoluent les
personnages est pour moi inédit. Le texte comprend de nombreuses expressions
Maori (expliquées en grande partie dans la VO) et l'ensemble est fort dépaysant. Cette lecture fut plus
qu'une lecture mais véritablement une expérience, quelque chose que l'on vit entièrement,
qui vous coupe du monde même s'il fait bon de sortir du livre régulièrement
pour prendre une goulée d'air frais tant la violence psychologique et physique y tient une part importante.
C'est un
livre dont il est difficile de dire : « je l'ai aimé » car cela donne
le sentiment d'être pervers et pourtant... J'ai été hypnotisée.
Dans ce
roman, chacun cherche un refuge dans l'amour mais ce terme a une signification
différente pour chacun. En outre, l'amour et la vie sont intimement liés ici à
la peur, à la souffrance et à la violence. Certaines scènes m'ont secouée,
voire choquée. Mais l'auteur est très douée pour créer une multitude d'émotions
chez le lecteur et ses personnages
sont complexes même si j'ai haï Joe
du début à la fin tout en comprenant partiellement les démons qui l'habitent.
> Quoi
que l'on pense de ce livre, il est inoubliable.
Booker Prize 1985