Wanting – Richard Flanagan

Wanting Désirer Richard Flanagan
Wanting – Richard Flanagan
Atlantic Books, 2010, 252 pages
(VF : Désirer)


A la colonie pénitentiaire de Van Diemen’s Land, qui est aujourd’hui la Tasmanie, un nouveau gouverneur, Sir John Franklin vient d’être nommé (nous sommes à la fin de la première moitié du XIXème). Les aborigènes déportés sont supposés l’accueillir. Une petite fille, Mathinna, vêtue d’une robe de soie rouge ne peut s’empêcher de danser, parce que c’est dans sa nature, parce qu’elle s’exprime ainsi, pas nécessairement parce qu’elle est heureuse. Elle fait impression sur Lady Franklin qui pousse son époux à l’adopter à des fins expérimentales. L’enfant est orpheline et le couple est curieux de savoir si le fait de plonger cette enfant dans un univers « civilisé », c’est-à-dire en lui apportant une éducation, en l’obligeant à se vêtir à l’occidentale, à porter des chaussures, bref en lui demandant de renoncer à qui elle est, peut en faire quelqu’un de présentable.

D’une façon plus large, l’auteur joue avec l’idée de ce qui distingue un sauvage d’un homme civilisé. C’est à ce titre que Richard Flanagan introduit une digression en recourant à Dickens (dont l’opinion était que le « sauvage noble » est une fiction). J’ai eu du mal à comprendre ce que Dickens venait faire dans l’histoire. Les faits mentionnés par Flanagan m’étaient connus mais, dans ce cas précis, je n’ai pas saisi en quoi les affaires de cœur de Dickens et ses qualités de comédien avaient un rapport avec le sujet. Certes la pièce créée par Wilkie Collins sous le patronage de Dickens traite du sort probable de Sir Franklin disparu dans le grand Nord et, il y est question du comportement d’hommes civilisés placés dans une situation extrême. Cependant, Flanagan ne développe quasiment pas cet aspect (alors que cela aurait été intéressant) et se focalise sur le personnage de Dickens (dont on n’a rien à faire, du moins dans ce contexte).

L'histoire évoque, dans un parallèle entre état sauvage et civilisation, la distinction entre la raison et le désir. Si l'on ne peut réduire le roman à ces questions, elles le définissent en grande partie.


Ce livre m’a laissé un sentiment de confusion. La quatrième de couverture (surtout celle de la VF) est assez trompeuse ou du moins simpliste. Je crois très sincèrement que le projet de Flanagan dépasse la présentation qui en est faite. Malheureusement, l’auteur a construit son livre de façon désordonnée (du moins l’ai-je ressenti ainsi) et le lecteur finit par se demander quel était le projet de l’auteur. Si le début est clair et plaisant, l’histoire devient de plus en plus difficile à suivre.
En effet, Flanagan lance maintes pistes et ne va au bout que de l’une d’entre elles, sans compter la digression dont l'utilité reste à démontrer.

En définitive, mes sentiments partagés viennent surtout de la construction du livre qui laisse un goût d’inachevé. Des personnages-phares sont présentés dans le premier tiers du livres puis ils disparaissent sans crier gare. Quand il arrive qu’on les retrouve, on ne sait rien de ce qui s’est passé entre-temps et, si on peut le deviner parfois, cela reste frustrant.
En outre, les chapitres sont organisés bizarrement que ce soit dans l’alternance entre les événements se déroulant dans l’ancienne Tasmanie ou à Londres ou encore dans le passage du temps.
Pourtant, Mathinna et Lady Franklin ont su me toucher. Ce sont des figures capables d'émouvoir le lecteur et j’ai fini le livre en songeant combien cette histoire était un horrible gâchis, gâchis que nous devons à la civilisation…

On ne peut que regretter la construction qui rend l'ensemble confus alors que des idées intéressantes promettaient une oeuvre riche.