L’Antarctique
– Claire Keegan
(Antarctica, 1999)
Sabine Wespieser Editeur, 2010, 256 pages
Sabine Wespieser Editeur, 2010, 256 pages
Traduction de Jacqueline
Odin
(existe en poche chez
10/18)
Ces quinze
histoires racontent le destin de femmes qui sont engluées dans un quotidien
étriqué où l’hiver semble être l’unique saison. Cette vie, c’est généralement
celle de l’Irlande rurale encore marquée par les traditions et dont les
habitudes ne sont pas tendres avec les femmes. Ceux qui connaissent l’œuvre de
Nuala O’Faolain ne seront pas étonnés, à la lecture de ces textes, que celle-ci
ait encouragé Claire Keegan dès ses débuts car on retrouve une communauté de
pensée entre les deux femmes.
Ce recueil est
un coup de cœur aussi bien sur
le fond que sur la forme.
L’auteur, d’une
voix tranquille et ferme, dépeint des femmes de tous âges qui décident de ne
plus suivre les règles du jeu qui leur ont été imposées, même tacitement. Cela
ne se traduit pas nécessairement par des éclats ; souvent, un simple geste
marque un basculement, telle cette femme qui un jour ne descend pas de voiture
pour ouvrir les barrières empêchant le passage du véhicule conduit par son
mari.
D’ailleurs, Claire Keegan préfère presque toujours la suggestion à la
confrontation, ce qui fait d’autant plus ressortir la violence rentrée. On
comprend de suite combien dans ces endroits, les relations entres les hommes et
les femmes manquent de naturel. La place de chacun est déterminée et chaque pas
de côté ne peut que provoquer un basculement.
Il y est aussi question de relations entre sœurs
où les non-dits se sont tant accumulés que le dialogue est devenu impossible.
Et même quand les protagonistes ne sont que des hommes, il y a toujours, en
filigrane, l’histoire d’une femme qui souffre ou a souffert.
Ce qui marque, ce sont les fins. Propres, ne
cherchant pas la chute à tout prix et encore moins l’esbroufe, elles sont
souvent un mélange d’implicite et de révélation, tout comme l’écriture
impassible de l’auteur transmet les drames de ces histoires. Nul doute que
Claire Keegan mérite la réputation qu’elle est en train de se tailler dans les
lettres irlandaises.
Le début de la première nouvelle peut se lire sur le site de l’éditeur, ici, en bas de page.