Les romantiques – Barbara Gowdy
(The Romantic, 2003)
Actes Sud, 2004, 420 pages
Traduction de Dominique
Hollier
Toronto, début des années 1960. La mère de Louise, « Grace
Kelly de banlieue », a disparu du jour au lendemain, sans laisser d’autres
traces qu’une impeccable garde-robe et un mot sur le frigo : « Louise
sait faire marcher la machine à laver. »
Louise aime Abel et tout son monde tourne autour de lui.
Celui-ci, fils adoptif des voisins, est un beau garçon généreux qui lit Rimbaud
et joue du piano. La nuit, il se promène sur un terrain vague pour observer les
animaux.
C'est l'histoire d'un amour
destructeur. C'est une histoire désespérée et belle à la fois. C'est l'histoire
d'une fille qui s'éprend d'un gars avec une intensité proche de la violence.
Louise brûle d'un feu opposé à
toute idée de médiocrité. Son ambition : sauver Abel du piège de l'alcool
et l'avoir tout à elle. Cependant, elle est tiraillée par cet amour qui la
dépasse un peu et la colère et le chagrin que lui inspire le comportement
d'Abel.
En effet, ce dernier est un être
singulier qui semble n'accorder aucun prix à sa vie sans pour autant la
mépriser. Il est souvent difficile à comprendre. Il aime Louise mais il aime
aussi tout le monde, d'une certaine façon. Tout être lui semble digne d'intérêt
en même temps qu'il semble insensible à l'idée même du mal.
Gowdy excelle dans la création de
personnages. Abel et Louise sont deux figures marquantes : le premier
parce que la fascination de Louise devient un peu celle du lecteur ; la
seconde parce que l’on voudrait la sauver, parce qu’elle est entière,
fragilisée par cet amour fou. Nous sommes dans le domaine du gris, là où rien n’est
sûr à commencer par les intentions d’Abel, un personnage insaisissable.
Les romantiques est une histoire d'amour singulière qui dit à la
fois la force que peut avoir ce sentiment mais aussi ses limites. Chacun manque
de quelque chose, chacun voudrait remplacer une absence : l’amour peut-il
la combler ? Rien n’est moins sûr.
C’est un roman que l’on n’oublie
pas.