A la vitesse de la lumière – Javier Cercas
(La velocidad de la luz, 2005)
Actes
Sud, 2006, 288 pages
Traduction
de Aleksandar Grujicic, Elisabeth Beyer
(existe
en Babel)
Dans une
université américaine, un écrivain débutant se
lie d'amitié avec un vétéran du Viêtnam anéanti par le poids de son passé.
Voilà un roman qui m'a énormément plu mais dont je suis
quasi-incapable de parler. Comme le dit le narrateur : « ... j'ai instinctivement compris que toutes
ces histoires étaient en réalité la même histoire...Je ne sais pas si elle est
terminée... Je ne sais pas non plus si je la comprends... ».
Il est difficile de cerner le dessein de l’auteur alors même
que les développements et les thèmes sont magistralement exploités.
« Ce sera un roman apocryphe, comme ma vie clandestine et invisible, un
roman faux mais plus réel que s'il était vrai. ».
Le propre d'un roman est d'être une invention ; or
celui-ci paraît tout ce qu’il y a de plus véritable.
Cette histoire est fascinante, inquiétante aussi, et il est
difficile de s’en détacher. C'est un texte et une écriture exigeants que nous
avons là et une incroyable puissance s'en dégage.
Dans ce magnifique roman, Cercas nous fait voir la guerre
dans toute son horreur parce qu'elle transforme un pacifiste en machine à tuer,
parce qu'elle laisse des traces indélébiles chez ceux qui ont été ses
instruments. Il s'interroge en parallèle sur les effets du succès et de la
toute-puissance qu'il peut donner à celui qui le connaît. Le succès comme la
guerre peuvent nous briser aussi durement, nous amputer d'une part de
nous-mêmes.
Cercas mène son intrigue avec une virtuosité consommée. Il
croise le destin de Rodney et de l'écrivain avec brio pour nous faire réfléchir
sur l'horreur du monde et l'éventuel pouvoir de la littérature. Car Rodney et
notre narrateur sont les deux faces d'une même histoire et c'est un lent
processus qui nous amène à comprendre cela.
On reste
happé par ces pages, par cette écriture qui dévide un très long fil jusqu'à la
fin, comme si le livre avait été écrit dans un seul souffle. Un livre poignant
qui ne peut que toucher. A lire !