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Il y a des soirs où rentrer chez soi fait comme une brûlure, une espèce de déchirure. Des soirs où l’air du dehors paraît doux, enveloppant, presque tendre, des soirs où l’on voudrait arrêter le temps, rester là, à regarder les gens, inventer leur vie, oublier la sienne. Quand j’étais enfant, je n’ai jamais rêvé d’école buissonnière, j’y allais de bon cœur, sans me poser de question ; mais au retour…
Au retour, déjà, ce pincement au cœur. J’aurais voulu faire maison buissonnière.
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Nous croisons dans ces textes des personnages qui, sauf exception, sont comme la plupart des gens : ils suivent le train-train de la vie sans faire d’éclats, sans avoir plus de problèmes que les autres : la banalité incarnée. Mais, on peut paraître banal et avoir un monde intérieur qui n’est pas aussi lisse que l’image que l’on renvoie à la société ; c’est notre respiration. Si nous devons agir conformément aux règles de la société, rien ne nous empêche d’avoir des pensées qui sont moins politiquement correctes.
Isabelle Minière excelle à créer des histoires, plus ou moins originales, mais toujours bien vues, où le narrateur partage ses opinions sur le monde qui l’entoure ou plus simplement sur ses « proches », telle Bérénice, une adolescente à l’esprit vif qui analyse le contenu de son assiette tout en observant ses parents. Parfois, le monde intérieur du narrateur est riche, beau, et on souffre avec le malheureux de cette dichotomie entre ce qu’il est et ce qu’il est supposé être. Mais d’autres personnages ne font que nous révéler leurs plus odieuses pensées, ou alors leur désespoir.
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C’est un recueil qui fait rire, qui rend triste, qui nous propose une multitude de situations et de conclusions ; c’est un recueil riche et équilibré, servi par une plume qui semble taillée pour les histoires courtes. J’ai beaucoup aimé le regard d’Isabelle Minière ; il correspond bien à ma vision des individus.
Ce livre vaut vraiment la peine que l’on s’y intéresse. C’est d’ailleurs le seul recueil de nouvelles que j’ai relu à ce jour.