Toute passion abolie - Vita Sackville-West

Toute passion abolie - Vita Sackville-West
(All passion spent, 1931)
Editions Autrement, 2008, 157 pages
Traduction de Micha Venaille
(existe en livre de poche)


Ses serviteurs, il peut désormais les renvoyer.
Depuis le grand événement, il a acquis
L'expérience véritable, la paix, la consolation,
Et la sérénité, toute passion abolie.
- Milton - 
(ouverture de la première partie. Le titre original est également tiré de Milton)


L'intrigue se déroule dans le milieu de la haute aristocratie anglaise du début du XXème. Lord Slane vient de mourir et sa veuve (88 ans) a décidé d'en profiter pour vivre enfin la vie comme elle l'entend, ce qui suppose de larguer les amarres avec ses enfants, une bande d'hypocrites intéressés.


C'est un roman très introspectif mais la vitalité de l'esprit de Lady Slane empêche tout assoupissement. Sa pensée est un heureux mélange d'expérience de la vie et d'idéalisme. Elle revient sur une vie qui n'était pas celle qu'elle aurait choisie mais elle le fait sans amertume et avec une acuité fascinante.
Cette vieille dame considère qu'à son âge, on a le droit de vivre comme on l'entend et c'est ce qu'elle compte faire. En l'occurrence, il s'agit de mener une vie tranquille de contemplation, détachée de ses enfants. La quatrième présente Lady Slane comme étant une personne indigne, ce qui est franchement malvenu. Si on n'a pas le droit d'être égoïste à 88 ans, c'est à se demander quand on pourra l'être... Cela d'autant plus que Lady Slane a consacré sa vie au service de son mari et de ses enfants. Il ne me semble pas déraisonnable qu'elle veuille vivre selon ses désirs dans le temps qu'il lui reste à vivre.

J'ai beaucoup aimé sa philosophie de la vie, non conventionnelle et faisant la part belle à la simplicité. C'est un livre apaisant, subtil, merveilleusement bien écrit, frais et plein de grâce et spirituel.

oOo

Deux extraits :

« J'ai toujours pensé qu'il valait mieux plaire beaucoup à une seule personne, qu'un peu à tout le monde. »

« A l’intérieur des gens que j’aime, il me semble toujours détecter quelque chose d’obstiné, allant presque jusqu’à la cruauté. Une sorte de noyau dur, une flamme, une rigueur absolue, un peu comme s’ils étaient déterminés à être fidèles quoi qu’il arrive à leurs engagements. »

oOo

Vita Sackville-West est à l'origine des célèbres jardins de Sissinghurst (le lien conduit à la galerie de photos et non à la page d'accueil du site). 
Elle eut en outre une aventure avec Virginia Woolf et cette dernière s'inspira de Vita pour camper le personnage d'Orlando. Leur correspondance est publiée chez Stock.