Mon oncle du Congo – Lieve Joris

Mon oncle du Congo – Lieve Joris
Mon oncle du Congo – Lieve Joris
(Terug naar Congo, 1987)
Actes Sud, 1990, 281 pages
Traduction de Marie Hooghe


L’oncle de Lieve Joris fut missionnaire au Congo belge de 1923 jusqu’au début des années 70. Dans les années 80, Lieve Joris décide de partir sur les traces de cet homme qui lui avait paru si exotique dans son enfance. Entre temps, le Congo belge est devenu le Zaïre et Mobutu qui incarne le dictateur africain type est au pouvoir (et il y restera trente ans).

Ce voyage était donc à l’origine motivé par la curiosité à la fois familiale et historique. Or l’auteur va rapidement souhaiter découvrir le Zaïre lui-même. Elle sera principalement confrontée aux questions politiques liées à la colonisation et à la décolonisation mais aussi au regard condescendant porté par les Européens sur les Africains parce que ces derniers n’ont pas les mêmes valeurs que les premiers, forcément supérieurs moralement.
Mais Lieve Joris ne tient pas compte des mises en garde ni des ragots. Elle est une femme indépendante qui, au travers de ses aventures, se fera sa propre opinion.

Si cette lecture fut un peu laborieuse, j’ai réellement apprécié suivre l’intrépide Lieve Joris dont l’ouverture d’esprit lui permettra de revenir enrichie. Elle met un point d’honneur à ne pas juger et à toujours avoir une démarche de compréhension de l’autre. Elle se mêle aux locaux, observe leurs modes de fonctionnement et met la main à la pâte. Elle tire des conclusions par elle-même au lieu d’avaler sans broncher les idées toutes faites que des Européens soi-disant avertis voudraient lui enseigner.

Lieve Joris découvre un pays qui survit grâce à la débrouillardise de ses habitants car, entre la décolonisation et la rapide prise du pouvoir par Mobutu suite à l’assassinat de Lumumba, le pays tient encore une méchante gueule de bois.
Elle remarque que le Zaïre a plus de problèmes que d’autres pays africains, « sans doute parce que le pays a pris un mauvais départ. A l’indépendance, il n’y avait quasiment pas de cadres supérieurs, il n’y avait ni médecins, ni officiers d’armée. Car si les Belges ont créé des écoles jusqu’au fin fond de la brousse, le congolais qui voulait poursuivre ses études n’avait qu’une solution : le séminaire. »

La lecture fut parfois poussive car l’auteur décrit minutieusement tout son séjour (sur plusieurs mois). Cependant, quand on prend du recul, une image générale apparaît et l’on se rend compte du chemin parcouru, de ce que cette expérience a apporté aussi bien à l’auteur qu’au lecteur.
J’y ai également appris que Matonge, un quartier de Bruxelles qu’une amie m’a fait connaître, tirait son nom d’une cité de Kinshasa ; que Kisangani était la « ville » qui avait servi de décor au roman de V.S. Naipaul A la courbe du fleuve

Je ne suis guère amatrice de l’Afrique mais ce récit m’a donné envie d’en savoir un peu plus sur l’histoire de ce continent, d’être capable d’en avoir une vision globale sur un plan géo-politique afin de mieux comprendre certains enjeux à l’œuvre dans ce continent intimement lié à l’Europe.

Je recommande ce récit d’une très grande richesse que mon billet n’a fait qu’effleurer.